"Quand je regarde mes réseaux sociaux, je vois mes amis se faire tuer." D’origine iranienne, Behnaz*, d’ordinaire souriante, avoue vivre dans l’angoisse d’un renvoi dans son pays et peine à masquer son stress. Là-bas, les femmes retirent leur voile – elle refuse elle-même de le porter – et font face à la répression du gouvernement en place. Ce dernier "est en guerre contre son peuple", affirme-t-elle.
Aujourd’hui, c’est cette menace qui plane au-dessus de la trentenaire, arrivée en France il y a dix ans pour poursuivre ses études et installée à Laval depuis sept ans. Dix ans que les préfectures lui octroient chaque année un titre de séjour d’un an.
Deux propositions de contrat dans des collèges mayennais
Behnaz possède une formation d’ingénieure en informatique. "C’est ma spécialité. Mais j’ai décidé de devenir professeur contractuelle car j’aime enseigner et le contact avec les jeunes", raconte celle qui tient à conserver son anonymat pour éviter des ennuis à sa famille restée en Iran. Anglais, technologie… Behnaz s’épanouit au sein d’établissements mayennais.
Ces trois dernières années, les postes lui étaient proposés bien avant l’expiration de son titre de séjour. Ce dernier pouvait être renouvelé à temps grâce à son contrat de travail à l’Éducation nationale. Cette fois, malgré deux propositions de travail tardives dans des collèges mayennais, la Préfecture lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour. "Car je n’avais pas encore renouvelé mon autorisation de travail, que je ne peux obtenir sans un contrat d’un an signé." Un cercle vicieux. Résultat : le Rectorat ne lui propose un contrat valable que jusqu’au 8 octobre, sa date de fin de droits.
Finalement, Behnaz accepte un autre contrat de 15 mois dans une entreprise. Ces derniers jours, elle a reçu un récépissé prolongeant son titre de séjour au 3 novembre. "Je ne sais même pas si je dois être contente, car je ne pourrai pas honorer la totalité de mon contrat", avoue-t-elle.
"Un dysfonctionnement de l’État qui se heurte à une situation dramatique en Iran"
"Behnaz réclame le titre de séjour longue durée auquel elle a droit", témoigne Jean-Luc Bansard, directeur du Théâtre du Tiroir, qui a décidé de lui venir en aide. "La France a besoin de professeurs. […] Les services de l’Éducation nationale lui ont expliqué cyniquement que c’est à elle seule de se débrouiller pour obtenir un titre de séjour."
Il poursuit : "La Préfecture lui répond que tout est du ressort du ministère de l’Intérieur. Nous allons saisir un avocat car elle a toujours été légalement en France. Mais elle ne sait plus à qui s’adresser devant les murs aveugles et sourds de nos administrations. Ce dysfonctionnement de l’État se heurte à une situation dramatique en Iran."
"Je suis venue ici pour vivre une meilleure vie"
Et c’est peu dire que tout s’accumule contre la jeune Iranienne : son dernier titre de séjour comporte la mention “temporaire”. "Ce qui m’empêche de bénéficier de mes droits au Pôle emploi, alors que j’ai pu en bénéficier il y a quelques années. Ce sont pourtant des droits que j’ai acquis en travaillant…"
Ses cartons sont prêts, mais la simple idée de retourner dans son pays d’origine la terrorise. "Je suis venue en France pour vivre la liberté en tant que femme. L’Iran est un pays formidable mais n’a cessé de régresser sur ce point. Je suis ici pour vivre une meilleure vie." Sous ses mains, une pile de documents dans lesquels elle ne trouve "aucune humanité". Behnaz est perdue : "Je ne sais pas quoi faire : préparer mes cartons ou vivre de façon normale ? Si l’État français veut que je parte, qu’il me le dise clairement."
À l’heure actuelle, la préfecture n’a pas répondu à nos sollicitations.
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