Lorsque Bertrand et Patricia Masserot se sont installés il y a une vingtaine d’années, la commune de Mayenne comptait "bien deux fois plus" d’exploitations agricoles.
En 2022, ils en possèdent une des six dernières. "Certains agriculteurs retraités n’ont pas trouvé de successeur. D’autres ont vu leur exploitation dévorée par la ville ou par la rocade."
Car ces agriculteurs ont pour particularité d’exercer leur métier en ville, ou plutôt à deux pas de la ville. "C’est bien et pas bien", résume laconiquement Matthieu Virfolet, un autre exploitant basé à l’opposé de Mayenne.
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Comme Patricia et Bertrand avec leurs volailles, Matthieu pratique la vente directe de ses produits laitiers et de sa viande. Et être aux portes de la ville, c’est un sacré avantage.
"Ça permet de se faire connaître. Ce serait plus compliqué en pleine campagne", imagine Matthieu, qui a déjà été salarié dans une exploitation beaucoup plus éloignée des centres urbains, à Montreuil-Poulay.
Si ces deux agriculteurs-commerçants accordent tant d’importance à cette activité, c’est qu’elle leur permet aussi de faire découvrir leur métier.
Et les clients se montrent curieux, de même que les promeneurs. "J’ai des champs au bord de la voie verte, ajoute Matthieu Virfolet. J’aime le contact avec les promeneurs."
Il partage cette situation avec Benoît Faucon, lui aussi éleveur à quelques pas de là.
Il constitue la quatrième génération de la même famille sur cette exploitation.
Globalement, la cohabitation se passe bien. Mais Matthieu constate trop souvent des incivilités.
Des déchets peu ragoûtants abandonnés dans ses champs - "des gens qui abandonnent des mouchoirs après avoir fait leurs besoins" - ou jetés par des promeneurs, "comme des canettes ou des sacs Mac Do".
Parfois, il peste aussi contre des personnes qui entrent dans ses champs sans préavis. "L’autre jour, il y en a un qui faisait baigner son chien dans une de mes mangeoires. C’était lui le plus gêné."
Une proximité qui a du bon
Mais tous s’accordent à dire que la proximité avec les urbains a du bon. "On est à côté de tout. Si on a une course à faire, on ne la repousse pas à la prochaine sortie à Mayenne, on prend dix minutes et on y est."
Patricia Masserot a ainsi pu faire profiter ses enfants d’activités extrascolaires. "Ils n’auraient pas pu en faire autant si on avait été en pleine campagne."
À l’inverse, la solidarité entre agriculteurs de Mayenne est rendue plus difficile par la barrière formée par la ville.
Ce dernier peut aussi compter sur un habitant d’un lotissement qui borde une de ses prairies : "Il garde un œil sur mes vaches et leur remet de l’eau de temps en temps. En échange, je lui donne du fumier pour son jardin. C’est du troc, ça me va !"
Avoir des champs et des prés au bord des lotissements, des voies rapides et des zones d’activité implique de subir une certaine "pression foncière". Difficile de s’opposer à la Ville lorsqu’elle décide de préempter des terres pour les consacrer à des projets immobiliers.
C’est un sujet d’inquiétude pour Matthieu, qui a déjà dû faire appel à la chambre d’agriculture pour ne pas perdre dix hectares, et pour Patricia, dont le fils souhaite reprendre l’exploitation dans quelques années.
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"On est tous impactés différemment", abonde Benoît, qui compte sur une "prise de conscience de la part de l’État pour arrêter d’artificialiser à toute vitesse. On a encore du chemin à parcourir."
En attendant, lui a décidé de représenter la profession au sein du conseil municipal de Mayenne. "Ça me tenait à cœur, il n’y avait pas d’agriculteur avant." Et comme Patricia, il a aussi à cœur de s’impliquer dans la vie associative locale. "C’est une manière d’apporter notre pierre à l’édifice."
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