Les bancs du tribunal de Laval (Mayenne) sont chargés pour cette audience du jeudi 24 novembre 2022. Le procès qui s’ouvre va opposer deux acteurs de la vie politique locale et semble retenir l’attention des Lavallois. Jean-Christophe Gruau, ancien conseiller municipal, est le prévenu. Étiqueté Front national (aujourd’hui Rassemblement national), il a été évincé du parti en 2015. La victime est Bruno Bertier, actuel premier adjoint à la mairie de Laval, qui a porté plainte contre le prévenu pour les nombreux tweets le mettant en cause.
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"Ce n’est pas un moment agréable"
Le parquet a donc décidé de poursuivre l’ancien élu pour outrage à personne dépositaire de l’autorité publique et injure publique en raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre. Le tribunal et la partie civile regrettent l’absence du prévenu, qui est retenu à Paris pour recherche d’emploi. Son avocat dira plus tard : "Quand il n’est pas là il manque, quand il est là, il gêne."
Il faut dire que depuis 2020, l’ancien conseiller n’y est pas allé de "main morte" sur Twitter : "Il lâche D’Aubert, puis lèche le derrière de Garot et finit avec Bercault." Il appelle l’adjoint "Tata", mais surtout, ce qui le rend hors de lui et déclenche ses sarcasmes c’est de voir des passages protégés et des calicots aux couleurs LGBT fleurir à Laval et "être payés par les impôts des contribuables lavallois".
Bruno Bertier est appelé à la barre et va faire part au tribunal de sa grande détresse et de la souffrance qu’il endure, ainsi que son mari et ses enfants.
L’adjoint finit en exprimant sa peur quand il voit les centaines de followers de Jean-Christophe Gruau.
"Ce n’est pas un débat, c’est un délit"
La partie civile est une avocate spécialiste des causes LGBT qui évacue avec fermeté l’aspect politique du conflit et recentre le dossier sur le côté dégradant des insultes : "Ce n’est pas un débat, c’est un délit." Pour elle, le prévenu ne fait que de reprocher sa sexualité à l’homme politique. L’avocate conclut en réaffirmant que "la liberté est essentielle" et ne demande qu’un euro symbolique et deux publications dans les journaux en réparation.
Le parquet qualifie d’entrée le caractère "inacceptable et outrageant des tweets". Le magistrat voit là une attaque frontale d’une personne et réclame six mois de prison avec sursis à l’encontre de l’ancien conseiller.
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"Une société aux mains de la cause LGBT"
La plaidoirie de la défense est longue et étayée. Le défenseur n’est autre que maître Benoit Gruau, frère du mis en cause, connu pour ses plaidoiries en faveur de la Manif pour tous.
L’avocat rappelle que le prévenu avait perdu son travail — il était rédacteur du journal municipal, ndlr — à la suite du "retournement de veste" de Bruno Bertier, qui a précédé la défaite de François D’Aubert. L’avocat décrit ensuite la victime comme un militant activiste du mouvement LGBT, et regrette que le maire de Laval ait déjà condamné son client avant même qu’il ne soit jugé.
Après une longue diatribe sur les dangers d’une "société aux mains de la cause LGBT, qui mettrait à bas la liberté d’un pays où la censure s’infiltre jusque dans les moindres recoins", le plaideur rentre dans le vif du procès et s’évertue à démonter point par point les fondements juridiques de l’accusation. L’affaire est mise en délibéré au jeudi 5 janvier 2023.
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