Le dimanche 11 juin 1967, un groupe de sept spéléologues amateurs de la société scientifique Mayenne Sciences de Laval s'aventure dans la vallée de l'Erve connue pour abriter de nombreuses cavités millénaires.
Luc Avignon, Daniel Bardoux, Roger et Nicole Bouillon, Georges Foubert, Philippe Garnier et Christian Gilles se rendent en prospection dans l'une d'elles, appelée cave à la Dérouine. Pendant plusieurs heures, ils dégagent des amas de pierre, espérant déboucher sur un accès. Et le résultat sera bien au-delà de leurs attentes car après avoir rampé dans un boyau de huit mètres, ils découvrent une salle abritant un ensemble de peintures rupestres où figurent notamment un mammouth et un cheval.
À l'époque enceinte de huit mois, Nicole Bouillon attend le groupe à l'entrée de la grotte. « J'étais inquiète, je ne les voyais pas revenir, témoigne-t-elle. Ils sont finalement ressortis de la cavité plusieurs heures après. Ils étaient tellement ébahis qu'ils n'avaient pas vu le temps passer. » « Roger [Bouillon] nous a dit immédiatement de ne toucher à rien et de ne rien emporter, il avait déjà pris la mesure de ce qu'on venait de découvrir, confie Philippe Garnier. Moi j'avais 17 ans, je peux dire que cette journée m'a fait grandir de plusieurs années », rit-il.
Ils gardent le secret
Le petit groupe s'accorde pour ne rien révéler de sa découverte pendant une semaine, le temps d'y retourner pour faire des photographies. « Je me souviens que cette semaine-là, mes parents me trouvaient bizarre », rit Philippe Garnier. « À l'époque c'était un terrain privé, je crois qu'on avait aussi peur de dire qu'on y était allé sans autorisation », confie Nicole Bouillon.
Une fois la découverte révélée, tout s'emballe. « Il a fallu sécuriser l'entrée, puis il y a eu beaucoup de chantiers de fouilles et de publications scientifiques », poursuit-elle. Les spéléologues amateurs doivent même se former au dessin pour reproduire les peintures présentes sur les parois. « On dépendait du centre universitaire de Rennes au début. Cette découverte contrariait les scientifiques, qui étaient certains qu'il n'y avait pas de grottes ornées au nord de la Loire. Ça a relancé l'intérêt archéologique autour de la vallée de l'Erve. »
Avec émotion
Ces souvenirs, Nicole Bouillon et Philippe Garnier les partagent avec émotion dans des vidéos, réalisées par la communauté de communes des Coëvrons. Deux autres inventeurs, Christian Gilles et Georges Foubert, ainsi que le photographe René Cousin, racontent également cette journée exceptionnelle, dont ils se souviennent de chaque détail. « Les trois autres inventeurs de la grotte Mayenne Sciences sont aujourd'hui décédés. Le temps passe, c'est précieux de garder une trace à travers ces témoignages, anecdotes et des images d'archives », explique Ulrich Fromy, responsable du site des Grottes de Saulges.
Ce qui est certain, c'est que cette journée de juin 1967 a marqué le reste de leur vie. « On a toujours suivi ce qui concernait la grotte : les travaux de recherches de Romain Pigeault en 1999, l'ouverture du musée, la visite virtuelle de la grotte*... », indique Philippe Garnier.
« La dernière fois que j'y suis allée, c'était en 2009, raconte Nicole Bouillon. Mes enfants l'ont vue bien sûr. D'ailleurs, mon fils, qui est né deux semaines après la découverte, y est allé la première fois à l'âge de 3 ans ! Aujourd'hui j'aimerais que mes petits-enfants voient ça pour qu'ils prennent conscience que leur grand-père a fait quelque chose d'exceptionnel. »
Précision : *La grotte Mayenne Sciences n'a jamais été ouverte au public. Pratique : vidéos visibles sur le site internet des grottes de Saulges.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.