Mayenne. La dernière tournée d'Isabelle Launay, factrice depuis 24 ans

9 km à pied, ça use, ça use... Pourtant, cette tournée du centre-ville de Mayenne, "la tournée 17, la seule tournée pédestre", Isabelle Launay la couvre depuis 15 ans, "avec [sa] petite chariote" mais aussi et surtout avec un bel enthousiasme. Sans compter les 4 km à vélo ! Le mercredi 22 novembre a été la dernière. "J'arrête, mais j'aime ce que je fais !", confie l'habitante de Marcillé-la-Ville. À partir de 56 ans et après 20 ans d'ancienneté en CDI, La Poste propose un TPAS (temps partiel aménagé pour seniors). À 59 ans, la factrice a saisi l'opportunité.

"On voit tellement de monde"

Lavalloise d'origine, Isabelle Launay a d'abord été pionne, puis remplaçante institutrice pendant cinq ans, et assistante maternelle, avant d'arriver à La Poste en 1999 pour des remplacements. Elle est embauchée en tant que "rouleur" en 2000. "C'est-à-dire que pendant huit ans, j'ai remplacé les collègues sur le secteur de Mayenne et les communes qui dépendent du centre de tri."

En 2008, "une vente de quartier est proposée". Une dizaine de collègues refusent cette tournée 17 avant elle. Isabelle Launay, qui la connaissait un peu pour avoir fait des remplacements, l'accepte. "À l'époque, c'était une tournée extrêmement chargée, notamment les courriers pour les commerçants. Je pense qu'elle effrayait et personne n'en voulait." La factrice s'était pourtant dit qu'elle ne deviendrait jamais titulaire d'une tournée : "J'avais peur de l'ennui. Mais je me suis dit : Allez ! Elle est arrivée jusqu'à moi, c'est un signe. Je prends."

Et elle a bien fait ! "A Mayenne, on est une bonne équipe et les 15 ans sont passés à une vitesse ! On voit tellement de monde sur cette tournée qu'il est en fait impossible de s'ennuyer." Isabelle Launay reconnaît qu'avec la numérisation, le nombre de courriers a beaucoup diminué d'où le rallongement de la tournée.

Elle ne s'est jamais perdue

"Je pense que le changement de rythme qui nous a été imposé depuis deux ans a contribué à favoriser encore plus le contact avec les clients. Au fur et à mesure du temps, on crée des liens." Pour sa pause méridienne, la factrice vient avec sa gamelle chez certains clients avec qui elle a pris l'habitude de déjeuner.

Elle a aussi sur sa tournée son "petit papy crêpes et madeleines", comme elle se plaît à l'appeler avec bienveillance. "Le métier de facteur a un caractère social très important", souligne celle qui au cours de sa carrière a sauvé deux vies : "Quand j'étais remplaçante, on entrait dans les maisons. J'ai découvert une petite mamie qui n'avait plus de réaction. J'ai appelé les pompiers et elle a été sauvée." Une autre fois, c'est pour "un petit papy qui avait passé la nuit, tombé dans son jardin", qu'elle a donné l'alerte.

En 15 ans de tournée, la factrice peut se targuer de ne s'être jamais perdue : "Le vieux Mayenne est vraiment sympa mais les remplaçants qui découvrent, peuvent parfois avoir du mal à trouver la boîte aux lettres."

Le seul vrai hic en fait pour Isabelle Launay, c'est la pluie. "C'est ce qui me gênait le plus !" Toujours pas au point de lui ôter le sourire : "Je sais qu'il en faut de la pluie, mais pourquoi ne pas l'avoir inventée uniquement la nuit ?", plaisante-t-elle.

L'heure du repos est venue. Le mari d'Isabelle est à la retraite depuis un an : "On en profitera pour se promener un petit peu." À pied ou à vélo ?