C'est un duel judiciaire haletant. Alors qu'il avait été condamné à six mois de prison avec sursis par le tribunal de Laval en janvier 2023, Jean-Christophe Gruau, ancien rédacteur du journal municipal de Laval sous l'ère François d'Aubert et ancien conseiller municipal FN, a finalement été relaxé par la cour d'appel d'Angers mardi 9 janvier. Il s'en était pris à Bruno Bertier, l'actuel premier adjoint de la mairie de Laval, entre 2020 et 2022, pourtant ancien conseiller municipal de la majorité de François d'Aubert, le surnommant sur Twitter "Tata Bertier". C'est une entière campagne de dénigrement contre sa personne que défendait Bruno Bertier devant le juge. Seuls deux tweets, non prescrits, étaient reprochés à Jean-Christophe Gruau, datant de la journée des fiertés à laquelle la mairie s'était associée en dessinant des arcs-en-ciel sur les passages cloutés et arborant des calicots aux couleurs de la cause LGBT.
Un pourvoi en cassation
La cour d'appel s'est fondée sur l'article 10 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et du citoyen sur la liberté d'expression pour étayer son jugement. "Ce dossier est loin d'être clos, s'exclame l'adjoint dans son bureau de la mairie, mercredi 10 janvier. Nous contestons la lecture des faits de la cour d'appel. Je travaille sur un pourvoi en cassation. Il s'agit pour moi de rappeler que l'homophobie est un délit, et non une opinion !" De son côté, Jean-Christophe Gruau se défend d'être homophobe. "Je suis satisfait de cette décision, elle est prise en droit. La loi sur la presse de 1981 et la liberté d'expression sont fondamentales. Quand on fait de la politique, il est normal qu'il y ait contradiction : ce n'était pas des tweets gratuits, mais des réactions à une campagne LGBT", constate l'avocat de Jean-Christophe Gruau qui est aussi son frère, maître Benoît Gruau.
Derrière ce procès, se cache l'enjeu de la liberté individuelle face à la liberté d'expression. S'il n'obtint pas justice en cassation, Bruno Bertier n'exclut pas un recours devant la Cour européenne des Droits de l'Homme pour remettre en cause l'article 10 et son interprétation extensive. "Je ne veux pas que cet arrêt d'appel fasse jurisprudence. Est-ce qu'au titre de la liberté d'expression, on peut tout dire ou tout écrire ? Des personnes homosexuelles se suicident à cause de l'homophobie", argumente l'élu. Au contraire, maître Gruau s'inquiète d'une dérive : "Six mois de prison avec sursis… Dans quel pays sommes nous pour que deux tweets entraînent des peines de prison ?"
"Qui va payer ?"
En tant que premier adjoint au maire, Bruno Bertier bénéficie d'une protection juridique payée par la municipalité et, in fine, les Lavallois. "Qui va payer ? s'interroge maître Gruau. Ça me surprend que la Ville prenne en charge ses frais de justice. Soit c'est public, soit c'est privé." Du côté de Bruno Bertier, la question ne se pose pas, même s'il estime avoir été attaqué personnellement et non politiquement. "Ce n'est pas un cadeau qui m'est fait par la municipalité. C'est mon droit. J'ai l'entier soutien du maire."
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