Comment un prêtre du Bocage devient-il un personnage contesté de l'histoire du Canada ? Né le 28 août 1859 à Saint-Mars-sur-Colmont, Adrien-Gabriel Morice rejoint le petit séminaire de Mayenne à 14 ans.
Imprégné du romantisme des grands espaces, il décide de devenir missionnaire au Canada dans la perspective d'une promesse de puissance. Il passe par le juniorat de Notre-Dame de Sion, le noviciat de Nancy et le scolasticat d'Autun. À l'issue il est, prétend-il " prêt à se battre parmi les humbles d'Amérique et à les conquérir ". En 1880, il est envoyé en Colombie Britannique. Mais il ne se sent pas d'enseigner le catéchisme dans un pensionnat.
Désinvolture
Aussi se fait-il remarquer au sein de sa congrégation en se moquant des règlements, refusant ses tâches d'enseignant, se présentant à la communion sans s'être confessé. Le directeur du scolasticat avait avisé le supérieur de Morice au Canada de ce que ce dernier est vaniteux, ambitieux et insubordonné. Malgré tout, il est ordonné le 2 juillet 1882. Il est affecté à la direction d'une école pour enfants à Williams Lake.
Mais déçu par cet emploi banal, il se livre délibérément à un enseignement médiocre, rompt le contact avec ses confrères, néglige ses devoirs sacerdotaux et dérange ses collègues lorsqu'ils officient. En août 1885, en guise de sanction, il est exilé au fort de Saint-James, dans une région surnommée la Sibérie du commerce des fourrures.
Démis de ses fonctions
Adrien-Gabriel Morice considère cette vaste région comme la terre promise. Il se met à apprendre la langue orale des Porteurs (tribu locale) dont il décline une version écrite afin de renforcer son autorité religieuse et séculière. Il en vient à se considérer comme "le roi du pays". Et afin de conforter cette emprise sur la tribu, il refuse de lui enseigner l'anglais et le français mais la convertit à un catholicisme sévère. Morice continue son projet hégémonique : il baptise un village du nom de Moricetown, donne à des lacs, des montagnes, des rivières son propre nom.
En 1903, sa totale incurie oblige ses supérieurs à le démettre de ses fonctions et à l'envoyer dans la région de Vancouver. On l'expédie ensuite au Manitoba où il vit vingt ans à Saint-Boniface (actuel Winnipeg). Mais là également, sa mégalomanie le pousse à s'isoler, à s'aliéner les autres, à provoquer, à déranger. On le déclare atteint de neurasthénie, de maladie mentale et d'épuisement physique. Il lui est recommandé de vivre seul dans un endroit tranquille.
Vraisemblablement, Adrien-Gabriel Morice n'aurait jamais dû être ordonné prêtre. Ses paroissiens furent négligés et exploités, ses confrères et ses supérieurs sans cesse la cible de son mépris cinglant. Celui qui se voulait être le roi d'un pays, meurt à Saint-Boniface dans une amère réclusion le 23 avril 1938.
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