Laval. Le B-A ba de l'intégration commence à l'épicerie sociale

Sur 150 familles qui fréquentent l'épicerie sociale, 40% sont d'origine étrangères. « Ce public avait besoin d'une autre pédagogie que celle pratiquée par les autres associations », expliquent Frédéric Levanier, du service insertion du CCAS (centre communal d'action sociale), et Sandrine Foureau, responsable de l'épicerie. Celle-ci a notamment souhaité que les ateliers se tiennent en français pour favoriser l'homogénéïté des discussions. « Mais les cours d'alphabétisation sont ouverts à tous », insiste t-elle. Le projet financé par le Contrat urbain de cohésion sociale et la Caf à travers le réseau “écoute, appui et accompagnement des parents” a été favorisé par l'arrivée à Laval d'Elmaza Nakhoul. D'origine franco-libanaise, née au Vénézuela, ce professeur de français, philosophie et arabe classique partage son emploi du temps entre l'enseignement du français langue étrangère au collège Alain-Gerbault, celui des bases de la langue française écrite et orale à un public francophone et des ateliers de réflexion et d'écriture. Les séances, menées avec passion et rigueur, sont complétées par une discussion libre autour de sujets généraux : le déracinement, la parentalité, l'autonomie et l'insertion professionnelle. Les témoignages enregistrés sont figés dans un rapport écrit par le professeur. Ils évoquent les obstacles à franchir quand on ne possède pas la langue : de la notice d'un ascenseur en panne aux formulaires administratifs, en passant par les devoirs des enfants à la maison. « Avant, je ne savais pas écrire mon nom. Aujourd'hui, quand ma fille rapporte un livre de la bibliothèque, je peux l’aider à le lire », témoigne Kaba, Guinéenne. Mais aussi le regard des collègues de travail. Sylvie, 32 ans, travailleuse en atelier protégé, confirme. « Je n’entends plus mes collègues du bureau faire des remarques quand je lis des notices au tableau ».
Un quatrième groupe s'est ajouté depuis cette année à la maison de quartier des Pommeraies. Initialement, il devait faire sa rentrée en septembre, mais pour des raisons budgétaires il n'a pu démarrer qu'en janvier. Au grand dam des onze élèves qui ont écrit une belle lettre au maire. « On voulait une aide trois fois par semaine à la place d’une fois. On veut apprendre à écrire. Si vous pouvez nous faire cela », explique Djuma, jeune femme russe de la république du Daghestan. « Le maire est toujours d’accord sur le principe d’augmenter la capacité d’accueil des ateliers, mais il y a les contraintes budgétaires », lui explique Sylvie Deslandes, adjointe au maire, convaincue que « l’inclusion, et non l’intégration, passe par la maîtrise de la langue ». « Une maison de quartier qui nous ouvre les portes, c’est la société qui nous ouvre ses bras », a noté le professeur sur son rapport. Ce travail sera prolongé par des échanges linguistiques dans le cadre du programme de réussite éducative, et des cours... d'arabe.